
Amito Margaret accompagnée des membres de son groupe de femmes. Photo : ACF-Uganda
Par Camille Guyot-Bender
Note de l’éditeur : Sensibiliser la population à la violence à caractère sexiste est l’un des moyens principaux pour renforcer le pouvoir d’action des femmes et aider les communautés du Nord de l’Ouganda. À Action contre la Faim, nous formons des membres de la communauté à devenir des activistes, à jouer un rôle de modèle et à venir en aide aux autres femmes. Le 24 Novembre est la Journée Internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et représente donc une bonne occasion d’honorer la vie difficile mais oh combien inspirante d’Amito Margaret, une femme activiste remarquable.
Amito Margaret et son mari Gabriel vivaient de l’agriculture dans le Nord de l’Ouganda lorsque la rébellion a frappé il y a de cela deux décennies. Au cours de cette rébellion, des insurgés se sont emparés de leurs récoltes et ont tué leur bétail, les forçant à abandonner leur foyer pour se réfugier dans le camp du Conseil municipal d’Anaka.
Une période difficile pour la famille d’Amito Margaret
Pendant près de 20 ans, la famille d’Amito Margaret est restée dans le camp, faisant face à un manque de nourriture et d’assistance. La perte de leur terre, de leurs moyens de subsistance et de leur stabilité les ont laissés traumatisés. Pour Gabriel, cette situation était devenue insupportable. Alors que lui et sa femme luttaient pour joindre les deux bouts et pour faire en sorte que leurs enfants puissent aller à l’école, Gabriel commença à consommer de l’alcool de façon excessive, et est devenu violent envers sa femme et ses enfants.
« Lorsque nous vivions au sein du camp, les tensions augmentèrent entre Amito Margaret et moi-même. […] Nos enfants avaient faim, et en tant qu’époux et père de famille, ma femme comptait sur moi pour s’occuper de notre famille, et pourtant je ne pouvais rien faire. Je me suis tourné vers l’alcool, buvant nuit et jour, pour oublier. » – Gabriel, le mari d’Amito Margaret, Nord de l’Ouganda.
Créer un avenir plus paisible pour les familles
En 2011, nos équipes sont arrivées au camp, et ont commencé à travailler avec Amito Margaret et d’autres victimes de violences à caractère sexiste. Proactive et déterminée, Amito Margaret a participé à toutes nos rencontres communautaires, et fut sélectionnée peu de temps après pour être la présidente d’un groupe de femmes.
Amito Margaret organisait fréquemment des formations et des rencontres communautaires chez elle. Au début, Gabriel acceptait à contrecœur, désintéressé par ce programme qu’il considérait comme un « programme pour les femmes », et ne présentait donc aucun intérêt pour lui. Cependant, petit à petit son intérêt s’est développé à l’égard des sujets abordés lors des rencontres.
« Le formateur du programme portant sur la violence à caractère sexiste parlait souvent des effets négatifs de l’alcool sur la famille, de l’importance de vivre en paix et d’aider ma femme dans les tâches, et des raisons pour lesquelles nous devrions nous organiser ensemble, comme mari et femme. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons développer notre foyer ensemble, en veillant à ce que nos enfants puissent continuer à aller à l’école, puisque lorsque nous serons âgés, ce seront eux qui prendront soin de nous. » – Gabriel, le mari d’Amito Margaret, Nord de l’Ouganda.
Gabriel a rapidement pris conscience de la pertinence des formations et de leur contribution au bien-être de sa famille, et a donc rejoint le groupe de soutien.
Par le biais d’un transfert d’argent et de formations visant à améliorer leurs conditions de vie, Gabriel et Amito Margaret ont été capables de récupérer leur terre, d’y cultiver des plantes et d’élever du bétail, et ainsi payer pour l’éducation de leurs enfants. Grâce aux formations reçues par l’entremise du groupe de soutien, ils travaillent désormais ensemble et n’ont aucun problème pour planifier leurs finances, les tâches domestiques et les responsabilités de chacun au travail.
Aujourd’hui Gabriel ne boit presque plus, et se concentre d’avantage sur son travail et sur les tâches domestiques, permettant ainsi à sa femme d’assurer son rôle de présidente du groupe de soutien. Gabriel apprécie le rôle de défenseur de l’égalité des sexes et de la résolution pacifique des conflits, qu’occupe sa femme au sein de leur communauté.
Gabriel confie: « Je sais que ma femme et d’autres femmes dirigeantes peuvent impacter de manière positive la communauté, et réduire les problèmes liés à la violence à caractère sexiste. »
Depuis sa création, le groupe de soutien a aidé près de 80 familles. Notre objectif à travers ces groupes de soutien est de donner la parole à des femmes comme Amito Margaret au sein de leur communauté. C’est pourquoi nous allons continuer à renforcer le pouvoir d’action des femmes en Ouganda, et partout dans le monde.